Partie 8 Traverser la mythologie de l’archipel le long de la mer du Japon

by lebaroudeurdelest.com

Après une longue pause entre Osaka et Kyoto et une remise en jambe un peu compliquée, il est l’heure d’attaquer la partie finale de mon voyage pour atteindre la fameuse ville de Hiroshima en passant par les préfectures de Tottori puis Shimane. Mon corps me réclame cette fin mais ma tête ne veut pas en finir des découvertes fantastiques du Japon. 

Je m’apprête à arpenter des régions plus reculées du pays. Du tourisme plus local et des rencontres de personnes peu habituées au tourisme vont se présenter. Voici mon histoire dans les préfectures de Tottori – Shimane – Hiroshima :

Je me lève tôt pour regarder la France jouer l’Afrique du Sud en quart de finale de coupe du monde de rugby, mais mon cœur est brisé par la défaite d’une équipe aussi talentueuse… Ma journée sera rude avec ce sentiment de défaite … La fatigue du réveil me fait me dire qu’il faut un peu plus de repos avant cette journée épuisante qui arrive.

Départ à seulement 10h45, le physique semble mieux tenir que les derniers jours. Je vise la plage d’Uradome aux alentours de Tottori avec un rythme moyen de 19 km/h malgré plusieurs montées, c’est pas tout mal. Je passe donc mon temps à envoyer le maximum de capacité pour atteindre la plage au plus tôt.

Le soleil commence déjà à descendre mais il faut que je combine la visite de cette plage avec les dunes de Tottori située à près d’une heure de route et tout ça avant le coucher du soleil. 

Je fais donc rapidement trempette avec mes jambes dans la mer. Je constate que les japonais ne vont pas vraiment se baigner en mer ni dans les lacs quand j’étais au Nord, c’est assez curieux de ne pas en profiter malgré toute cette eau à disposition de ce pays exclusivement insulaire. Je vois aussi quelques déchets, je suis un peu triste de ça. 

Les petits sanctuaires et les petites falaises donnent vraiment un charme à l’endroit, parfait pour passer une après-midi si on a le temps de faire la rando dans les rochers, mais ce n’est pas mon cas. Il me reste moins d’une heure pour attraper les dunes avec encore un peu de soleil. Je me donne à 200% dans l’effort.

Enfin de retour à la plage, on y trempe les petons
Beau
Les ptits ilôts
Mini sanctuaire à côté

J’y suis, je peux admirer Tottori No Sakyu ! Je vois d’abord la dune géante appelée Horse Back (dos de cheval). C’est pas faux, on dirait un peu. Le creux de la dune est déjà bien à l’ombre, je dois donc encore grimper le dos du cheval en vitesse pour ENFIN admirer la descente définitive de la boule de feu. 

Et là… je contemple, le vent me gifle la face mais c’est magnifique. Les grains de sables qui passent dans les pieds, cette lueur rouge orangée au loin vers l’Ouest et ses dunes surplombant la mer du Japon, c’est juste waouw. 

C’est pour ce genre d’instant bloqué dans le temps, ne durant finalement que quelques minutes, que je fais ce genre d’échappées belles.

Le horse back sur la droite le coucher qui se profile en fond, VITE !
Regard porté vers l'Est
Je suis subjugé

La nuit tombe, l’émotion redescend et je cherche un spot camping proche des parkings de la dune. J’ai encore quelque chose à visiter sur Tottori demain, toujours lié au sable. L’emplacement est idéal, proche des toilettes, caché derrière un buisson. Parfait ! Je me cuisine un petit quelque chose utilisant la bouteille de gaz que Vincent m’a laissé. 

Mon sommeil va être de bonne facture. RDV demain pour … ? Le musée du Sable pardi ! 

Jour 47 Tottori à Yonago (104 km)

La visite matinale du musée du sable est si intéressante que j’y perds beaucoup de temps. 

Le thème cette année : l’Égypte antique. Un groupe d’artistes venus du monde entier se rassemblent pour former des sculptures majestueuses, de Khéops et Gizeh, à Cléopâtre et Ramsès et son tombeau, tout est millimétré pour conserver ces œuvres plusieurs mois malgré leur fragilité.

Le sable matchant parfaitement les structures de l’Egypte, je trouve ça au point. Les années précédentes, il y avait la Russie, les États Unis  et même la Tchécoslovaquie, ça me fait un petit truc de le constater (vu que je vis en Slovaquie) ! 

Depuis l’extérieur, on peut voir une dernière œuvre, de toutes petites représentations d’animaux de l’Égypte et une dernière vue sur les dunes avant mon départ.

L'entrée d'Abou Simbel (et le fameux Sphinx en fond)
Les boss d'Egypte
Les conquêtes d'Egypte Napoléoniennes
Navigation sur le Nil
Oeil d'Horus
Cléopâtre à l'aise avec ses servantes
Vue de la balustrade, globale sur toutes les oeuvres
Chat malicieux d'Egypte

Je pars seulement après 12h … mon objectif c’est Yonago, ça va faire long pour une demi journée… Je tombe sur un mignon petit sanctuaire de lapins qui portent bonheur. Des petites sculptures mignonnes sont à apprécier. 

Je consomme mon déjeuner dans un petit établissement, le Goto Café. Je prends un combo improbable de curry avec des Saint-Jacques, c’est pas mauvais et très fort en goût ce curry dis donc.

Le mignon lapin de la chance
Hotate / Saint-Jacques au curry
Les pubs "aguichantes" de perso féminin de manga pour des chocolats aux noix 😀
Le micro crabe qui fait sa rando sur bitume

Avant mon arrivée sur Yonago, je m’arrête à Narishi Hama, la plage des galets, on peut y entendre de belles sonorités lorsque la vague se défait du réseau de caillou, c’est très mélodique et reposant à l’oreille.

Bel endroit pour reposer en paix
Des champignons de pierre bizarres
Plage de galet musicaux

En arrivant sur la ville en pleine obscurité, une envie de pizza me prend. Je trouve la première pizzeria venue et je me goinfre, pas mauvais mais bon, je préfère celles de chez nous des vrais italiens 😛 

Je m’arrête crècher près d’un golf en toute discrétion. J’espère pouvoir dormir tranquille à la belle étoile pour économiser du temps de rangement demain avec un départ prévu très tôt afin de récupérer le bus matinal vers le mont Daisen (la montagne imposante de l’Ouest du Japon).

La Pizza Nipponetana 😀

Jour 48 Yonago/Mont Daisen Randonnée “Pause”

Le réveil tôt n’aura pas suffit… je rate le bus à 2 minutes près… J’ai mis trop de temps à savoir comment garer mon paquetage dans le parking à vélo de la gare… 

J‘ai donc 2 heures à tuer avant l’ascension prévue. Je vais me prendre des petites viennoiseries à la boulangerie française de la gare. 

Puis, me vient l’idée de me rafraîchir le minois, j’ai un rasoir jetable, je fais donc la fête à ma barbe, j’ai l’impression de passer ma majorité hahaha. Avec la touffe que j’ai, ça prend une plombe. Je dois même opter pour les ciseaux pour débroussailler le gros du volume et finir au rasoir ensuite. 

Finalement, le bus de 9h30 me réussit. Je discute avec un couple de japonais qui parlent super bien anglais. Ils me disent qu’ils ont déjà fait le pèlerinage pour Saint-Jacques de Compostelle en 3 fois. Comment c’est possible me direz-vous ? Les japonais ne peuvent prendre que 2 semaines de vacances par an et le trajet dure 30 jours, ils ont donc dû faire 10-12 jours de marche 3 fois et reprendre là où ils avaient terminé la fois précédente. C’est vraiment des fous mais ils m’amusent bien avec leurs histoires, de vrais voyageurs curieux. 

Lorsque je les quitte, une jeune fille non asiatique vient me demander si je suis français et bien sûr que oui c’est une française 😛 Lorette, pas commun comme prénom, je n’avais jamais entendu. On papote un peu pour finalement se décider à faire la grimpette ensemble. Ça va être sympa d’avoir de la compagnie pour l’ascension. On entame cette rando avec un rythme assez régulier et quelques pauses. Même si elle pense avoir moins de capacité physique que moi pour monter à cause de mon trip, je trouve que honnêtement elle se débrouille bien. Et je ne souhaite pas bombarder comme un zouave non plus, je veux aussi me reposer un peu. 

Elle vient de Marseille et a fait des études dans l’urbanisme/l’organisation du territoire sur Toulouse et Lyon. Elle vient de démarrer un PVT (Permis Vacances Travail de maximum 1 an pour voyager et faire un peu de sous pour réduire les coûts) en démarrant d’abord sur Osaka il y a un mois. Elle va d’auberge en auberge ou fermes pour des petits boulots ou juste de la visite et de la détente. J’apprécie son courage de faire ça toute seule dans un pays inconnu, à peine ses études terminées, elle gère. Elle peut s’occuper d’enfant, aider aux tâches d’une ferme, retaper une auberge etc… Il y a un gros panel de possibilités dans ces visas d’un an. 

Elle me dit qu’elle ira sur l’île de Miyajima dans 1 semaine qui est à côté de Hiroshima, où j’irais également très bientôt. On pourra sûrement se revoir là bas, c’est sympa 🙂

Au fil de la discussion, on se rend compte qu’on arrive doucement au sommet (1700 m). On voit la péninsule de Shimane, la mer du Japon s’y engouffrer et les alentours de la côte, une vraie belle vue s’offre à nous. Les couleurs d’automne pointent aussi le bout de leur nez dans les hauteurs un peu plus fraîches. Le beau temps nous permet de profiter pleinement du moment et de faire une belle pause.

La mer au fond d'une vue incroyable
Le mont et ses crêtes alentours
La jeune demoiselle et l'enfant de 18 ans au sommet 😀
Vue sur les côtes

On redescend en partie par un autre chemin et quelle farandole de couleurs. L’automne arrive tout doucement par ici. C’est plaisant combiné avec la mousse et le reste du veroyant qui jaunit. On tombe aussi sur un temple et de la nature surprenante. Les images parlent d’elles mêmes.

Les rochers sont sur notre chemin du retour
Le temple de derrière les fagots
Mousseux le bois
Quel "fruit" bizarre
Lanterne perdue
Coucher de soleil dans la zone
La rougeur se dessine dans les hauteurs

En attendant le bus du retour pour Yonago, je vois que ma seule option pour dormir sous un toit pas trop chère sera le même hôtel que Lorette, je réserve donc ma nuit là-bas et on peut donc continuer la soirée ensemble sur la ville. 

On part manger dans un petit resto du coin, je prends un Genghis Khan, nommé ainsi car le support sur lequel on mange la viande ressemble à un casque mongol. La salade de Daikon (gros radis japonais) est également délicieuse. On finit sur un bar sympa avec le proprio rigolo mais j’aurais dû demander les prix… 3400 yens pour deux verres, ça fait plus que n’importe quel resto où j’étais sorti jusque là. 

Mais c’est pas grave, le moment était cool avec la miss, on s’est bien marré dans tout les cas. On rentre chacun dans nos dortoirs et on se reverra sur Hiroshima, je l’espère 🙂 !

Miam le Genghis Khan, salade de daikon et poulet frit

Jour 49 Yonago à Matsue (Shimane) (65 km)

Je démarre doucement pour Mihonoseki au bout de la péninsule à l’Est. 

Tout d’abord, en partant de Yonago, je m’arrête chez un vieux monsieur qui fait des takoyaki de toutes les sortes, je ne sais pas exactement lequel je prends mais c’est très bon. Je discute un peu anglais avec lui et une cliente, l’ambiance y est chaleureuse. Je prends aussi plein de viennoiseries dans une boulangerie style français, encore une fois. J’y peux rien, ils en font des mignonnes à prix raisonnables, c’est tentant. 

Le chemin prend un peu plus de temps pour atteindre le village de pêcheur et son phare. On voit même le mont Daisen où j’étais hier. Par le voyage en vélo, on se rend visuellement compte des efforts à fournir pour parcourir certaines distances et lorsqu’on les réalise, c’est encore plus satisfaisant.

Takkoyaki de la générosité
Curieuse maison
Ceee genre de paquebot

Au phare, je rencontre un trio de choc, un couple et la maman (grand-mère) qui sont super sympathiques avec leur quelques mots d’anglais. Ils me disent qu’ils ont vécu au Brésil et qu’ils savent parler le portugais de la région. Je ne m’y attendais pas de la part de japonais, belle surprise.

Je traverse ensuite le village de Mihonoseki et son petit sanctuaire où je récupère un Goshuin (signature spécifique d’un sanctuaire shinto ou temple bouddhiste). Le passage ici est vraiment super sympa et authentique. Une contrée à l’écart de tout et en même temps semblant si accessible lorsque l’on peut y parvenir à vélo. J’ai beaucoup aimé l’endroit.

Le phare, que l'on peut voir de plus près bien sûr
La maman et son fils (la compagne prenant la photo)
Passage sur Mihonoseki
Les anciens vont prier
Le joli pont shinto
Vue sur le village
Ebisu (un dieu de la mer) nous accueille
Rochers sanctifié et le Mont Daisen en fond

Je me dirige par après vers Sakai Minato. C’est la ville de Shigeru Mizuki (mangaka très connu au Japon mais peu à l’étranger) et on voit très rapidement pourquoi. Son œuvre principale Gegege no Kitaro est un monde avec pleins d’esprits (Yokai) et donc toute une rue est “infestée” de statues plus ou moins grandes de toutes les créatures présentes dans son histoire. C’est très marrant et on peut s’arrêter vraiment pour chacune d’entre elles, c’est très très bien fait. Je n’ai pas vraiment vu plus que cette longue rue à part la gare où l’on voit Kitaro faire son assemblée avec ses compères et une grande affiche.

L'équipe de bonhommes
Les "yeux" nous surveille à la gare
Gegege et sa clique

Je dois me hâter pour visiter un jardin japonais avant sa fermeture et partir vers Matsue. Ça fait beaucoup pour une fin d’après-midi. Je bombarde donc pour avancer, je pense avoir traverser le pont avec l’arc le plus arrondi de ma vie, une colline le truc 😛 

Mais j’arrive à temps pour visiter le Yuushien. Que dire ? Le jardin est somptueux, les fleurs sur l’eau comme des nénuphars, les arbres, la mousse, l’effet de brume etc… tout est super poétique et photogénique à souhait. La voie spirituelle que les japonais empruntent dans leur conception de jardin est fantastique, je ne m’en lasse jamais. J’adorerais m’inspirer un peu chez moi un jour sans trop forcer, l’usage des petits cailloux, rochers équilibrés avec le vert et les autres plantes donnent du corps à cette œuvre d’art naturelle. Le jardin bucolique et presque paradisiaque.

La nuit commence à tomber et les touristes chinois présents m’embêtent un peu, ils sont plus bruyants et prennent des plombes pour prendre des photos sans laisser la place aux autres. On sent la différence entre les deux peuples très très vite. 

Pour les dernières minutes, j’arrive à me retrouver presque seul et refaire un tour des belles plantes avec les superbes lumières du coucher de soleil sans être dérangé. Je suis chanceux. 

Toutes ces fleurs, waouw
Pololo
Les légères teintes d'automne arrivent
On se croirait dans un film
Regardez les détails apportés au sable
Les pinpins
Une pause dans le tumulte du voyage
La solitude pour apprécier ces derniers instants
Oh p*tin, c'est beau

Je décolle de nuit vers Matsue et fais de mon mieux pour faire un check-in à une heure pas trop tardive. Le gérant est cool à mon arrivée. 

Je pars arpenter la ville de nuit dans les zones actives. Je cherche à pouvoir goûter les 7 délices du lac Shinji (juste à coté) mais c’est un fail, le seul endroit que j’avais de recommandé est plein. Je me rabat donc sur un autre établissement pour goûter des plats variés dont un qui doit être mon plus loufoque jamais dégusté de ma vie. On reste d’abord dans le classique avec une brochette de bœuf, de la daurade du jour et un fromage fumé (presque aussi bon que les fromages slovaques fumés). Puis, vient le monstre, le Tsuboyaki de Sazae (comme le temple vu à Aizu Wakamatsu). Une sorte de bulot/turbo japonais un peu plus préhistorique dans sa forme, cuit sur le barbecue et mariné dans la sauce au saké lors de la cuisson. C’est, comment dire, étrange, on dirait qu’on sort un démon de sa coquille avec une forme incomparable à quelque chose de commun pour nous en Europe. C’est pas mauvais mais pas très bon non plus, la texture caoutchouteuse n’aide pas pour se dire que tout va bien 😀 , mais ça valait le coup de l’expérience. En cadeau, je récupère le chapeau du Sazae et le garde précieusement dans mon porte monnaie. 

Miam le boeuf
Curieux fromage fumé
La bête marine se dévoile
On sort le crustacé de sa cachette
Finito
Et un souvenir en poche
Chainsawman à la craie ! C'est génial

Je souhaite encore me délecter d’une bonne boisson plus au centre, je finis par trouver un petit bar que deux jeunes étudiants en Baito (travail temporaire, habituellement effectué par des étudiants ou personnes en PVT) tiennent d’une bonne manière. C’est enfaite un couple et ils sont très mignons ensemble Eishin et sa copine dont j‘ai oublié le nom (oups). Ils me parlent de leurs études, de leurs objectifs, on sent qu’ils sont heureux d’être là, la tête n’est pas tourmentée. Eishin me donne même un papier pour me rappeler tous les ingrédients du menu des 7 délices du lac : le bar, la crevette, l’anguille, l’éperlan, la blanchaille, la carpe et le shijimi (mollusque). En japonais, le moyen mnémotechnique est le suivant su-mo-u a-shi-ko-shi : Suzuki, Moroge-ebi, Unagi, AmasagiShirauo, Koi, Shijimi. Merci Eishin, j’espère pouvoir les goûter un jour maintenant que je les connais tous. 

C’est ainsi que se termine ma nuit sur Matsue, ville que j’apprécie déjà beaucoup 🙂

Jour 50 Matsue à Izumo (47 km)

Je prends encore ma matinée sur Matsue. Je visite son château qui lui, vaut vraiment le détour, l’intérieur est très impressionnant. On y comprend réellement la structure de l’édifice et on a la place pour visiter tranquillement tout le lieu. C’est aussi un des mieux conservé avec Matsumoto. La structure est faite en sorte que le poids se répartisse sur tout le bâtiment et pas uniquement le sol de ce que j’ai compris. Toutes les poutres verticales traversent 2 étages pour soutenir le tout. Une vraie prouesse d’architecture. Le clan Matsudaira (proche du shogun) a  régné la majeure partie du temps dans la région.

A la conquête du château
On y arrive
Ca c'est pas de la poutre faiblarde
Vue depuis le sommet
Coucou le lion

En parlant du clan Matsudaira, un des membres a fondé son école de cérémonie du thé sur Matsue. J’en profite donc pour visiter le Meimei-An pour y déguster un super matcha et son wagashi dans un cadre exceptionnel, la vue sous la pluie est superbe. Un jeune apprenti me sert la boisson chlorophyllée d’une manière très protocolaire, on ne rigole pas avec ça, une vraie institution ici. Je reçois même deux wagashi, un représentant les bourgeons du théier en vert (wakagusa : jeune pousse) et un qui représente une sorte de champ de colza fleurit en jaune (natane no sato : 1 papillon sur un champ de colza). 

Je visite encore les alentours et déguste un succulent ramen, puis m’en vais ensuite vers le centre pour envoyer mes dernières cartes postales.

Le lieu de l'extérieur
Les beaux wagashi de couleur
Quelle vue dans ce salon de thé reculé
Les grandes étendues d'eau à travers la ville et autour du château
Qu'il est bon ce ramen

Je file ensuite vers Tamatsukuri Onsen (un onsen du Kojiki, le livre de mythologie shinto). On sent petit à petit qu’on pénètre LA préfecture de la mythologie japonaise. La ville est truffée de référence, en particulier Okuninushi, l’ancien roi du Japon dont les empereurs successifs du Japon seraient les descendants. Je profite de petits Ashiyu parsemés le long du cours d’eau traversant le village, l’ambiance brumeuse donne un caractère intriguant au lieu. Je goûte aussi un bon petit dessert en forme de Magatama (un porte bonheur en forme de neuf, que même les empereurs possèdent lors des successions) et m’achète des madeleines en forme de Shijimi. A défaut de goûter le vrai coquillage hier, je mangerais la douceur à son effigie aujourd’hui.

Okuninushi et sa femme
Rivière et Ashiyu
Les petons font trempette à l'abri malgré la pluie
Magatama en pierre
Magatama en dessert à la fraise et les madeleines en shijimi
Le dragon cerbère démultiplié

Le reste de l’après-midi consistera à tout donner en longeant le lac Shinji pour arriver à Izumo qui est LA ville de la mythologie japonaise. J’attrape le coucher de soleil sur la plage sacrée d’Inasa No Hama et son rocher, à quelques minutes près. Cette plage représente le lieu où les dieux viennent se rencontrer une fois par an (vous vous doutez bien que les japonais en ont donc fait un festival, plus spirituel que la majorité). C’est très drôle le nombre de gens qui se sont précipités pour le coucher et ont disparu en quelques minutes. J’essaie de profiter encore un peu plus longtemps de cet instant.

Le très grand lac Shinji
Arrivé à la fameuse plage
Le rocher innatendu et déifié

Je pars ensuite visiter de nuit le très fameux sanctuaire Izumo Taisha (grand sanctuaire d’Izumo) dédié à Okuninushi. Je le ferais encore de jour demain matin. 

Je vais très discrètement me chercher un spot camping juste à côté, proche d’un musée, j’espère ne pas avoir de souci. Je me lèverais tôt demain pour déguerpir.

Le lieu de l'extérieur
Les opercules de yaourt japonais hydrophobes (regardez les gouttes)
Simple mais joli à l'extérieur

Jour 51 Izumo à Yunotsu Onsen (68 km)

Réveil tôt. Quand j’ai presque tout remballé de ma tente, un monsieur me voit. Je déguerpis donc très vite pour me fondre dans la masse et visiter les lieux. Je gare et sécurise mon vélo sans trop de soucis, je ne m’inquiète pas pour mes affaires, on risque pas de me voler par ici (et nul part ailleurs au Japon).

Le complexe du sanctuaire est vraiment colossal, l’entrée se fait par la voie de droite et la sortie la voie de gauche, celle du milieu est réservée aux Dieux et leurs descendants (roulement de tambour … les empereurs), autant dire que peu “d’humains” l’empruntent celle-là. C’est le deuxième sanctuaire le plus important du Japon après celui d’Ise Jingu (dédié à Amaterasu, LA déesse du soleil, divinité la plus importante de cette religion) à Mie que je souhaiterais clairement voir dans le futur. En parlant d’Amaterasu, à l’entrée on voit en sculpture la scène de Okuninushi offrant la gouvernance du pays à Amaterasu et sa lignée, c’est par cet acte que ce sanctuaire lui a été dédié. Okuninushi est donc vu comme un personnage vertueux et altruiste en écoutant les conseils de son fils (je dois vraiment lire un peu du Kojiki). 

Le bâtiment principal fait actuellement 24 m de haut (potentiellement 48 au Moyen-Age), ce pourquoi il est nommé grand sanctuaire car c’est le plus haut du Japon. Il est restauré tous les 60 ans.

Entrée de Izumo Taisha
Prière à l'entrée
On fait la queue pour la prière, ici il faut taper 3 fois des mains au lieu de seulement 2
Instant prière devant le grand sanctuaire
Okuninushi rendant le pays à Amaterasu
On voit l'ampleur des bâtiments à l'arrière

Sous un autre bâtiment, je vois la plus grosse corde Shinto (Shimenawa) de ma vie. Faite en paille de riz ou de chanvre, elle marque la pureté et la sacralité d’un lieu ou bien d’un objet lorsqu’elle l’entoure (comme des arbres ou des rochers). On pénètre ainsi le domaine des dieux. 

Ici, le thème est En-musubi (les liens et la destinée, encore une référence au film Your Name, on arrête pas :P), Okuninushi en est un de ses fiers représentants. C’est pourquoi l’on vient prier pour une relation de couple ou d’amitié lorsque l’on vient ici (en majorité les jeunes filles/femmes) ou bien pour remercier qu’une union soit arrivée et qu’elle perdure. 

Je m’achète un joli porte-bonheur tout blanc avec des écritures dorées. Les petites statues de lapins autour du sanctuaire sont trop choux. 

En général, j’aime beaucoup ce lieu, il y a une bonne énergie.

La corde est-elle géante ou le petit tout petit ?
Okuninushi nous souhaite un beau départ
Les lapins
Papa Maman et petit lapino
Que prépare t-il dans son pot magique

Mon temps devient compté car je souhaite arriver à plusieurs dizaines de kilomètres avant la nuit, un événement spécifique m’attend. Mais d’abord, goûtons la spécialité de la région : les Izumo Soba. Après un essai infructueux dans un établissement fermé, je fais 20 minutes de queue pour obtenir mon siège et déguster ce met en 3 étages : Sanshoku Warigo Soba. On a 3 condiments différents pour déguster ces nouilles au sarrasin. Le premier étage étant des légumes sauvages (sorte de haricots fins), le deuxième avec la patate douce (Yam) et le dernier avec du daikon râpé et la chapelure des tempuras. MIAM. J’aimerais reproduire cela à la maison.

Lieu pour se délecter des soba de Izumo

Mais maintenant assez de temps perdu, il faut arriver sur Yunotsu Onsen, un tout petit village de pêcheurs mais aussi connu pour un spectacle de Kagura dans un sanctuaire tous les samedis soir. Ca tombe bien, j’ai tout calculé pour arriver un Samedi héhé. Par contre je veux essayer de réserver mais ne trouve rien … Je croise les doigts pour qu’on m’accorde une place quand j’arrive. 

Sur le chemin, je perds encore pas mal de temps avec une erreur de concentration. Je ne ferme pas correctement mon sac et mon chargeur tombe dans un tunnel, je mets 5 minutes à m’en rendre compte pour essayer de retourner le récupérer. Après une marche terrifiante dans le tunnel avec les camions et voitures qui déferlent, je retrouve le câble en état mais le transfo complètement explosé, je garderais le morceau survivant en souvenir x) en espérant trouver un magasin d’électronique demain … Je survivrais avec ma batterie externe ce soir. 

La mer du Japon s'agite
Kaputt le transfo

J’arrive trop tard pour choper une nuit dans un camping… Je pars d’abord devant le sanctuaire demander aux jeunes s’il me reste une place pour voir le spectacle. Ils me garantissent que oui il n’y a pas de soucis, je suis soulagé. 

J’ai une heure pour trouver un spot pour camper et revenir, je suis chanceux de trouver un terrain de sport abandonné idéal pour m’installer. Je fais ça rapidement et charge le téléphone autant que je peux pour apprécier ce qu’il va suivre.

Rues légèrement éclairées de Yunotsu Onsen
Les belles sculptures toutes mimis

J’arrive au sanctuaire, on me trouve un petit coussin proche du rideau marquant l’entrée des comédiens, les gens sont tous impatients pour l’événement, l’énergie a l’air magique. 

Le spectacle commence et là, mais quelle claque ! Je suis subjugué. Les chants des acteurs, la musique des gars du temple à l’arrière, les danses et chorégraphies, les costumes magnifiques, tout se couple à merveille. On assiste à deux scènes du Kojiki. D’abord un combat de deux hommes contre deux personnages masqués (je ne comprends pas les explications en japonais, je ne peux donc pas donné plus de détails sur cette scène). 

Au début, beaucoup de dialogues sur un même rythme puis, les danses s’accélèrent, ça cri, ça chante et ça se chahute jusqu’à la victoire finale des deux protagonistes principaux. 

A l’entracte, on assiste à un changement des artistes, les musiciens du premier acte deviennent acteurs et vice versa. La scène suivante est sur le combat entre Susanoo-no-Mikoto et Yamata-no-Orochi, le dieu se battant avec le dragon démoniaque avec 4 entités. Le combat est très impressionnant dans la manipulation des grands costumes de dragons pour effectuer certains déplacements. 

La musique s’accélère et les chants aussi, les gens sont à fond avec un grand sourire. Ce genre de représentations sont juste exceptionnelles.

Je suis absolument fan du truc, je prends milles photos et vidéos. Pendant les scènes, je dois même supprimer des fichiers pour économiser de la mémoire qui commence à faire défaut.

A la fin, on peut encore prendre des photos avec les costumes et les acteurs, l’ambiance est super conviviale et accueillante. J’ai un sourire aux lèvres immense et il ne me quittera pas jusqu’au coucher. JE SUIS RAVI. Toutes les galères du jour ont été oubliées pendant ce spectacle magique d’une heure. L’apaisement est de mise pour rentrer dans mon cocon campeur.

Les acteurs et le public
Coucou je suis un dragon
Chasseur de dragon

Jour 52 Yunotsu Onsen à Hiroshima "FIN" (Hiroshima) (112 km)

Petit réveil aux aurores pour aller au Onsen à 7h. J’ai un peu peur avec le monde et mon tatouage mais tout va tranquille au final. Les papis me tapent la discute au calme. Ils se foutent de moi aussi quand je ne peux pas supporter le bain brûlant haha c’était très sympa. 

Je demande aussi à un jeune si il n’a pas de chargeurs/transfo mais il me dit que non. Pour autant, il m’amène à un bar où je peux combiner petit-déj et recharger le téléphone et la batterie, je prendrais donc mon temps. Un monsieur de Morioka qui était au spectacle d’hier me fait un peu la discussion et me dit que je suis le bienvenu si je repasse là bas un jour, trop cool 🙂 !

Je papote un peu avec la serveuse qui me sert un Ochazuke : petit-déj complet avec du riz et d’autres ingrédients cuits dans du thé. Assez original et on sent le côté sain du truc (et plus appétissant que du natto 😛 ). Elle vient de Tokyo mais a décidé d’apprendre le plus de choses manuelles dans un village mignon mais tout perdu du Japon et de se financer en travaillant dans ce bar. Je suis impressionné par ses objectifs et sa maturité. Je vois l’étendue de ses compétences et ambitions avec son journal intime où elle note / dessine / imprime des photos pour montrer ce qu’elle apprend, entreprend, découvre presque chaque jour de la semaine. 

Assoiffée d’artisanat, la demoiselle, c’est dingue, je l’envierais presque. En 2 ans, elle sait découper un poisson parfaitement, tailler et couper des arbres, faire la cueillette de fruits et légumes, l’extraction d’écorce des arbres et quand même voyager dans le pays, incroyable. C’est un vrai petit bout de femme comme on pourrait dire, bravo.

Splendide réveil matinal
Mon nouveau copain de Morioka
La tranquilité sur Yunotsu Onsen

C’est pas tout ça mais moi je dois arriver sur Hiroshima ce soir et ce n’est pas à côté. Mon départ se fait à 10h20, j’espère caler les 110 kilomètres sur la journée. Et Oui, j’arriverais à 18h30 sur Hiroshima avec 2h de pause au total.

Je fais donc un bon 6h de route et un beau 1300m de D+ sur le chemin. D’abord, les dernières vues sur la mer du Japon et ses très petites plages avant d’attaquer les hauteurs et la fin de la préfecture de Shimane qui m’aura vraiment marquée. L’aspect pittoresque et brutal de la mer me semble me souhaiter un bel au revoir et une belle route. J’en ai le cœur serré comme maintes fois durant ce trip qui me touche de plus en plus personnellement, je m’attache aux lieux et au pays en général. 

Plage
Dernière vue sur la mer du Japon, un surfeur se cache sur la photo

J’arrive doucement sur la préfecture de Hiroshima et peut admirer les montagnes centrales du Chugoku. Je récupère un adaptateur pour le téléphone assez rapidement, pas trop de problème à ce niveau là. Avant d’arriver sur Hiroshima, je peux apprécier les lueurs du coucher de soleil sur les montagnes, ce qui est vraiment très beau. 

Encore une aquarelle qui se dessine devant moi

En posant rapidement mes affaires à l’hostel, je profite de mes dernières forces pour me diriger vers le quartier des Okonomiyaki de la ville : Okonomimura. Un immeuble avec plusieurs étages dont 3-4 remplis de petit resto d’Okonomiyaki (environ 4-5 par étages c’est un délire le truc). Je prends un resto au hasard. Le cuistot et ses acolytes ont vraiment la tête de l’emploi pour tenir ce genre de lieu, blagueurs et un peu foufou, j’aime bien, ça me met à l’aise. Comme c’est Hiroshima, l’okonomiyaki est différent d’Osaka, je ne peux pas vraiment me décider lequel je préfère. Les nouilles et la structure plus agencée apportent un truc mais le côté moelleux de la pâte cuite à Osaka me manque aussi. Je dirais match nul pour le moment.
(Petite info sur ce plat, il a été popularisé pendant/après guerre lorsqu’il n’y avait pas grand chose à manger, les gens ont adapté cette recette avec les ingrédients disponibles en fonction de leur région, c’est ce que le nom du plat veut dire : griller ce que vous aimez.)

Je déguste mon mets délicieux puis rentre m’effondrer dans mon lit car les prochains jours seront toujours actifs malgré l’atteinte de mon objectif de fin de parcours initial.

Okonomimura, lieu, préparation, dégustation

Cette denière journée marque un tournant dans mon voyage : l’atteinte de l’objectif initial finalisé.

Je me revois chaque journée passée sur l’archipel défiler sous mes yeux. Un pur plaisir (avec quelques peines physiques ou sentimentales), un truc que l’on ne vit peut être qu’une seule fois dans sa vie (même si j’espère que non).

Que me réserve le reste du trip ? Vous le verrez sur les jours et articles suivants, à commencer par mon repos sur Hiroshima et une destination bonus ! Rdv partie 9 pour le découvrir !

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